L’utilisation de l’approche cognitivo-comportementaliste dans la gestion du stress

Voici un extrait tiré de mon mémoire “L’utilisation de l’approche cognitivo-comportementaliste dans la gestion du stress“, rédigé en Décembre 2010 pour l’université PARIS 8 dans le cadre du diplôme d’Etudes Supérieures d’Université : Pratiques du coaching. Ce mémoire a été réalisé sous la direction de Mme Edith Filaire, coach et professeur des Universités.

D’autres extraits seront mis en ligne dans les jours qui viennent, n’hésitez pas à revenir régulièrement sur ce blog pour en connaître la suite. En premier lieu, nous nous poserons la question :

Qu’est-ce que l’approche cognitivo-comportementaliste ?

1/ Fondements du courant comportementaliste : influences du courant comportementaliste sur le coaching.

C’est au 19ème siècle que naît la psychologie scientifique avec l’étude de problèmes psychologiques par l’observation méthodique et l’expérimentation. La création du premier laboratoire de psychologie expérimentale par Wundt en 1879 marque l’indépendance de la psychologie vis-à-vis de la philosophie et de la physiologie. Watson énonce en 1913 que la psychologie n’est pas une science de l’âme mais une science du comportement. Le comportementalisme ou behaviorisme s’appuie sur la théorie de l’apprentissage. Il s’oppose au mentalisme, considérant qu’il faut concentrer son attention uniquement sur les données observables du comportement. La « boîte noire » contenant émotions et langage intérieur est provisoirement ignorée. Dès 1927 Pavlov publie un ouvrage sur les réflexes conditionnels, mettant à jour le conditionnement simple à partir d’une expérience sur des chiens. Dès les années 60, nombres psychologues ne se contentent plus du modèle simpliste stimulus réponse pour expliquer les comportements. Ils introduisent et développent la notion de médiation cognitive. C’est la « révolution cognitive » centrée sur le traitement de l’information.

A : La thérapie comportementaliste

Théories et pratiques cliniques sont en interaction constante, conformément aux principes d’une démarche scientifique (observation, expérimentation, évaluation). Dans la ligné de Watson, (Jones,1924) en testant plusieurs méthodes pour traiter des phobies, a révélé l’efficacité de deux d’entre elles ; le déconditionnement par exposition progressive au stimulus anxiogène et l’imitation de modèles. En 1954, Wolpe, à partir d’une expérience sur les chats, publie une théorie des phobies chez l’être humain et met au point un traitement par désensibilisation systématique (relaxation, confrontation imaginaire et réelle). Cette technique s’appuie déjà sur des processus cognitifs (confrontation imaginaire) et sur l’autogestion d’affects (gestion du stress par la relaxation). Eysenck publia en 1960 le premier livre relatif à la « thérapie comportementale ». Il créa la première revue de thérapie comportementale, contribuant ainsi au véritable essor de cette approche (Van Rillaer, 2002). En 1953, Skinner a démontré l’impact de l’environnement physique et social sur le comportement d’une part et la possibilité pour chacun d’améliorer l’autocontrôle d’autre part. Les conséquences positives ou négatives d’un comportement sur l’environnement engendrent ou non son renforcement selon le principe du conditionnement opérant. Bandura (1977), avec la création du modèle d’apprentissage par imitation et du concept d’impuissance apprise, se situe à l’intersection des courants comportementaliste et cognitiviste.

B : Comportementalisme et coaching

Le coaching, à l’instar de la thérapie comportementale s’inspire d’une démarche scientifique. Le coach a le souci d’instaurer une relation de confiance et de collaboration réciproque afin de travailler sur « l’ici et maintenant » dans une période limitée. Il procède par définition d’objectifs, évaluation de résultats, test d’hypothèses, réajustement des interventions, expérimentation active avec une volonté délibérée de s’affranchir d’un dogmatisme tout puissant. Le coach utilise diverses techniques comportementales telles que le jeu de rôle, la relaxation, la confrontation aux situations anxiogènes afin d’atténuer progressivement l’intensité émotionnelle par habituation.

2/ Fondements du courant cognitiviste : influences du courant cognitiviste sur le coaching.

Au 2ème siècle après Jésus-Christ, l’empereur romain Marc Aurèle, guerrier et philosophe écrivait « Si quelque objet extérieur te chagrine, ce n’est pas lui, c’est le jugement que tu portes sur lui qui te trouble. Il ne tient qu’à toi d’effacer ce jugement de ton âme ». A travers les auteurs tels que Sénèque, Epictète, Marc Aurèle, les stoïciens proposaient un enseignement tourné vers la quête du bonheur, distinguant les choses qui sont en notre pouvoir de celles qui nous dépassent. Cette philosophie s’accorde avec le modèle constructiviste qui considère que le monde est une vue de l’esprit par laquelle nous créons les sentiments de bonheur ou de malheur. Partant de ce même postulat, les thérapies cognitives se sont développées sur trois hypothèses indissociables ; nos difficultés psychologiques sont dues à notre style de pensée et de perception des évènements, il est possible d’apprendre à les modifier, cette modification aura des effets bénéfiques sur les pensées mais aussi sur les comportements et les émotions qui en dépendent (André, 2005). Le mot cognition, issue du latin « cognito » désigne une pensée. Le cognitivisme est un mouvement issu du comportementalisme auquel il sera intégré sous l’appellation de néo behaviorisme ou behaviorisme cognitif. Les psychologues cognitifs étudient la médiation cognitive qui se produit entre les stimuli externes et les actions manifestes. Le cognitivisme est né dans les années soixante aux Etats-Unis. Nous allons étudier les travaux de ses deux pères fondateurs : Ellis et Beck.

A : Les thérapies cognitives

  • Ellis : la thérapie rationnelle – émotive (TRE)

Directement inspirée de la philosophie stoïcienne, la TRE a pour but d’apprendre à s’accepter (et accepter le monde) tel que l’on est et non tel que l’on voudrait être. Les émotions, comportements et pensées dysfonctionnels sont les conséquences de systèmes de croyances irrationnelles développées par le sujet. Ellis a identifié 10 croyances irrationnelles correspondant à des obligations morales excessives (Pichat, 2008) : la recherche d’approbation et d’estime, la réussite/compétence détermine notre valeur humaine, l’évaluation globale de la valeur humaine des individus sur la base de leurs comportements, la construction des événements insupportables, l’origine de nos maux et de nos problèmes, l’importance donnée aux évènements non désirés, accepter de travailler sur soi-même, le déterminisme et la toute-puissance du passé, l’injustice des choses telles qu’elles arrivent, le besoin de certitude. Ellis propose un modèle de traitement A-B-C-D-E qui se déroule en 5 phases ; A représente l’événement déclencheur qui active les systèmes de croyances, B désigne la croyance irrationnelle, C désigne les conséquences émotionnelles, cognitives et comportementales mises en œuvre par l’individu, D désigne l’évaluation critique de la croyance irrationnelle afin de la déstabiliser (en quoi est-elle logique ? réaliste ? profitable ? efficace ?) et l’identification de croyances alternatives plus adaptées, E désigne les gains pratiques cognitifs comportementaux et émotionnels des nouvelles croyances de substitution (Pichat, 2008d). Ce modèle, plus philosophique que scientifique a fait l’objet de vives critiques. Ellis ne propose pas de théorie du fonctionnement mental. Sa thérapie n’incluant pas de vécu expérientiel, est considérée comme appartenant au courant cognitiviste radical.

  • Beck : schémas cognitifs et thérapie

Beck, en conceptualisant un modèle de fonctionnement mental conscient et inconscient, a « légitimé » le courant cognitivo-comportemental. Il est le fondateur de la théorie cognitive. C’est en soignant des patients en dépression sévère qu’il identifie leur façon particulière de traiter l’information, systématiquement négativement. Progressivement il définira le schéma cognitif spécifique à cet état affectif. Les schémas sont la partie la plus profonde de la variable cognitive. Ils représentent l’ensemble des croyances et des convictions intimes que le sujet entretien sur lui-même et sur le monde. Ils expriment toute une série de règles de vie à priori légitimes mais dont l’application rigide et systématique devient néfaste pour le sujet. Ils correspondent à l’intériorisation précoce de règles familiales ou sociales ou encore à l’impact d’évènements de vie marquants (André, 2005). Le schéma est latent et peut se réactiver lorsqu’une situation va rappeler le contexte de son élaboration. Il va polariser l’attention du sujet sur cette situation et en orienter la lecture, entraînant des distorsions cognitives. Le processus de traitement de l’information obéit aux 2 mécanismes d’assimilation et d’accommodation définis par Piaget. Face à un événement incompatible avec l’un de ses schémas cognitifs, l’individu peut ignorer l’évènement, en effectuer une lecture distordue afin de le rendre compatible (assimilation) ou modifier ses convictions profondes qui ne correspondent pas à la réalité observée (accommodation). Finalement, les thérapies cognitives ont pour objectif de développer les capacités d’accommodation et diminuer les tendances à l’assimilation, c’est-à-dire aider le sujet à davantage tenir compte des faits et s’y adapter. Beck a identifié 9 distorsions cognitives : l’auto injonction, la minimalisation du positif, la maximisation du négatif, l’inférence arbitraire, la sur généralisation, l’abstraction sélective, la personnalisation et la dichotomisation (Pichat, 2008b). Dans son modèle cognitif de la conscience et de l’inconscient Beck distingue 4 niveaux de cognitions et processus (Cottraux, 2006) :

1. Les schémas cognitifs se situent au niveau inconscient. Ils ne se présentent pas de façon directe à la conscience et sont stockés dans la mémoire à long terme. Ils fonctionnent de façon automatique, très rapide et sont difficile à modifier. Comme nous l’avons vu, ils influencent les processus cognitifs de traitement de ’information par les mécanismes d’assimilation (distorsion possible) et d’accommodation.

2. Au niveau préconscient apparaissent les événements cognitifs que constituent les pensées automatiques, monologues intérieurs et images mentales. Les évènements cognitifs permettent d’accéder aux schémas inconscients dont ils résultent.

3. Au niveau conscient correspond l’attention focalisée. Les schémas cognitifs peuvent apparaître indirectement à travers un discours caractérisé par des formulations impératives de type « il faut», « je dois ».

4. Le quatrième niveau est celui de la métacognition ou cognition sur les cognitions. Pour Beck, chaque état affectif résulte d’un schéma cognitif correspondant qui fonctionne sur ce modèle théorique global. L’émotion est considérée comme la voie royale vers la cognition. Son approche s’avère particulièrement efficace dans le traitement des dépressions et troubles de l’anxiété. Elle est également utilisée dans le traitement des TOC, boulimies, schizophrénie et troubles de personnalité.

B : Thérapies cognitives et coaching cognitif

Outre les principes d’une collaboration scientifique déjà évoqués, nombres techniques de coaching ont été empruntées à la thérapie cognitive ; la résolution de problème, l’analyse des comportements et de leur contingences, la technique de la flèche descendante, l’identification des distorsions cognitives de Beck, la restructuration cognitive par transposition du modèle ABCDE d’Ellis au coaching rationnel émotivo-comportemental (Pichat, 2008). Auerbach (2006) considère que la boite à outils du coach cognitif contient les techniques développées par la thérapie cognitive (ex. : croyances d’Ellis, schéma de Beck). Pour lui, le schéma induit des types de comportements qui peuvent être productifs ou non. Il travaille sur la notion d’ajustement, en s’appuyant sur ce qu’il appelle le « mode adulte sain » du coaché, comparable à l’état du moi adulte en AT. Il utilise l’échelle d’inférence de Senge (ou échelle d’hypothèse de Nadler) pour aider son client à prendre conscience de ses processus de pensées et de la manière dont il sélectionne arbitrairement ses informations.

C : Thérapie cognitivo-comportementale (TCC) et coaching cognitivo-comportemental (CCC)

Dans les années 70, l’expression TCC a démontré la volonté de concilier les approches comportementales et cognitives pour en améliorer l’efficacité. Ce qualificatif présente l’inconvénient de mettre l’accent sur l’aspect cognitif au détriment des affects et de certains processus corporels. Depuis les années 60 les publications se sont démultipliées dans les pays anglo-saxon, la majorité des psychologues des pays latins restant centrés sur le modèle freudien. Les concepts et théories se sont développés, le champ des applications s’est élargi. Confronté à ses propres limites, à savoir leur validité culturelle, les TCC semblent s’orienter vers une autre perspective ; l’analyse contextuelle du comportement avec en chef de file Hays (Fontaine, Fontaine, 2007). Pour Neenan et Palmer (2001), le CCC est une TCC appliquée à une population non clinique visant l’amélioration des capacités d’introspection et de prise de décision. Grant (2003) a testé expérimentalement

L’efficacité du CCC, l’a comparé au coaching cognitif et au coaching comportemental. Il a montré que le coaching cognitif augmente la santé mentale globale du sujet ainsi que le concept de soi tandis que le coaching comportemental augmente la performance académique. Toutefois, seul le CCC permet le maintien de l’amélioration des performances dans la durée. Pour Kilburg et Diedrich (2007), la nature personnalisée de la relation de coaching garantit le maintien des performances. Selon eux, le CCC s’avère particulièrement pertinent pour les dirigeants notamment en cas de gestion de stress, en ce sens où il est pragmatique, orienté résultat et s’appuie sur des données objectives. Les dirigeants ont besoin d’acquérir de nouvelles compétences ou d’éliminer des comportements inadaptés. Le CCC leur permet une prise de conscience psychologique et sociale, source de sagesse et de connaissance de soi, notamment par la prise en compte des émotions. La limite du CCC réside dans sa simplicité (introspection limitée) et l’absence d’approche globale de l’individu pris dans un système organisationnel. En cas de situation complexe, les auteurs recommandent une approche psycho dynamique.

2 thoughts on “L’utilisation de l’approche cognitivo-comportementaliste dans la gestion du stress”

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